Budget 2023 : pourquoi la fin des crédits à l’export sur les énergies fossiles est décisive

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Publié le 27 septembre 2022

C’est l’une des principales décisions du projet de loi de Finances pour 2023 sur le plan environnemental : la fin des crédits à l’export pour les projets d’énergie fossile à l’étranger sur l’ensemble de la chaîne de valeur, depuis l’exploration-production jusqu’au transport et au stockage. Un engagement pris par la France à la COP26 de Glasgow il y a un an, qui se concrétise aujourd'hui. Des exceptions concernent encore toutefois les centrales à gaz et au fioul.

Le budget 2023, présenté lundi 26 septembre en Conseil des ministres, prend l’engagement de ne plus octroyer, à partir du 1er janvier 2023, de crédits à l’export pour les énergies fossiles, depuis l’exploration-production en amont, jusqu’au raffinage en aval, en passant par le transport et le stockage. Grâce à son agence de crédit à l’exportation (Bpifrance Assurance Export), l’État français soutient les activités à l’export des entreprises actives sur son territoire, en jouant le rôle d’assureur en dernier recours. Ces assurances publiques, appelées garanties à l’exportation, permettent aux entreprises d’obtenir plus facilement des prêts de la part de banques commerciales.

"Très concrètement, cela signifie que TotalEnergies ou ses sous-traitants par exemple ne seront plus soutenus par la France pour mener des projets d’énergie fossile au Qatar ou en Ouganda, précise Anna-Lena Rebaud, de l'ONG les Amis de la Terre France. C’est une avancée décisive. En outre, la politique de la France est plutôt ambitieuse puisqu’elle va être mise en œuvre dès la fin de l’année et que les exceptions ne s’appliquent pas lorsque la durée de vie des installations existantes ou leur capacité de production est augmentée", explique-t-elle.

Des exceptions pour les centrales à gaz et au fioul

À la COP26 sur le climat de Glasgow, en 2021, la France avait pourtant tardé à s'engager sur le sujet. Sous la pression de la société civile, elle avait finalement rejoint la Déclaration de Glasgow, une coalition d’acteurs qui vise à mettre fin à tout nouveau soutien public à l’étranger au secteur des énergies fossiles d’ici la fin 2022. À ce stade, seulement cinq acteurs ou pays ont pris des mesures effectives. Mais si la décision française est saluée, une exception notable demeure : les centrales de production électrique à base de gaz ou pétrole ne sont pas couvertes. 

"Or, investir aujourd’hui dans ce type de projets et construire la dépendance de régions aux hydrocarbures pour les prochaines décennies ne représentent ni bénéfice pour le climat, ni pour la transition énergétique des pays du Sud. Cela détourne des capitaux des véritables solutions et ralentit le développement des énergies renouvelables", déplorent les Amis de la Terre. Le budget 2023 prévoit également une exception pour les "opérations ayant pour effet de réduire l’impact environnemental négatif". Cela signifie que l’État pourrait soutenir des technologies comme la capture et stockage de carbone, qui ne sont pas encore matures et qui restent très coûteuses.

Cette décision établit une norme pour la finance envers les énergies fossiles

"Reste qu’il s’agit là d’une importante victoire sur laquelle on va pouvoir aller plus loin, en essayant d’embarquer d’autres pays mais aussi les acteurs privés. Cette décision établit une norme pour la finance envers les énergies fossiles. Toutes les banques françaises doivent s’aligner dessus", plaide Anna-Lena Rebaud. "Elle met aussi un coup à la stratégie de TotalEnergies qui explique qu’il est nécessaire de développer le pétrole et le gaz, on espère que ça va remettre en question leurs plans de développement", ajoute-t-elle.

Entre 2016 et 2020, la France a soutenu des projets pétroliers et gaziers à hauteur de près de 2 milliards d’euros, principalement sous forme de garanties à l’export. Parmi eux, le projet d’exploitation et liquéfaction de gaz en Arctique russe, avec une garantie de 350 millions d’euros accordée en 2017 à Technip ou encore le gazoduc de 879 km entre la Grèce, l’Albanie et l’Italie avec une garantie de 450 millions d’euros accordée en 2018 à Spiecapag, une entreprise spécialisée dans la pose de pipeline. 

Concepcion Alvarez @conce1

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