Gaz, nucléaire, renouvelables : la France est-elle assez armée pour passer l’hiver ?

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Publié le 25 juillet 2022

Face aux risques d’approvisionnement énergétique, jugés quasi-inévitables cet hiver, et à la sécheresse qui frappe tout le pays, le gouvernement se veut rassurant. Un plan élaboré avec les entreprises devrait voir le jour à la rentrée. Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a aussi appelé les Français à multiplier "les petits gestes du quotidien". Sans contrainte toutefois car "ce n’est pas notre philosophie", a-t-il assuré. Mais la France est-elle suffisamment armée pour passer l’hiver ? Novethic fait le point.

Gaz : des stocks au plus haut 

Face à l'hypothèse d'une rupture des approvisionnements en gaz russe de plus en plus crédible, l’État a pris les devants. Les niveaux de stockage de gaz sont à 70 % de remplissage, un niveau plus élevé que d’habitude. Et le gouvernement a relevé son objectif de 80 à 100 % pour le début de l’automne. En outre, un plan de sobriété est en cours d'élaboration afin de réduire de 10 % la consommation d’énergie d’ici deux ans par rapport à 2019. Un terminal méthanier flottant, porté par Total au Havre, pour importer davantage de gaz, est également dans les cartons. Des dérogations et simplifications administratives ont été adoptées dans le cadre du projet de loi sur le pouvoir d'achat pour accélérer sa mise en service.

Mais il ne sera opérationnel qu’en septembre 2023. Et l’avantage de la France, qui compte plusieurs terminaux d'importation de GNL et des interconnexions gazières avec l'Espagne, est aussi à relativiser. Il faudra en effet assurer une certaine solidarité avec nos voisins européens moins bien lotis, comme l'a souligné la Commission européenne la semaine dernière. Bruxelles demande en outre aux membres de réduire volontairement leur consommation de gaz de 15 % dès le 1er août et jusqu'au 31 mars 2023. Le gaz représente 16 % de notre consommation d'énergie primaire.

Nucléaire : plus de la moitié du parc actuellement à l’arrêt

À ce jour, 30 des 56 réacteurs sont indisponibles, alors que le nucléaire est la première source d'énergie en France. Cela est dû à des opérations de maintenance sur les installations, au grand carénage qui doit permettre d’allonger la durée de vie des centrales de 40 à 50 ans, mais aussi à des problèmes de corrosion découverts sur une douzaine de réacteurs. Le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) affirme que le traitement de ces problèmes "prendra plusieurs années" et que "des mises à l'arrêt supplémentaires pourraient avoir lieu".

En outre, les centrales sont aussi vulnérables au changement climatique. En ce début d’été, avec la canicule, quatre centrales ont obtenu des dérogations pour reverser une eau plus chaude que les seuils autorisés dans les cours d’eau environnants, afin de ne pas pénaliser la production, mais au détriment des écosystèmes. Une solution qui ne peut pas être pérenne.

Hydraulique : la sécheresse menace

C’est la deuxième source d'approvisionnement en électricité derrière le nucléaire. Mais la sécheresse qui touche le pays, avec un hiver particulièrement sec, a entraîné une baisse de la production. Selon des données compilées par Le Monde, le leader, EDF, accuse ainsi une baisse de 33,4 % en juin, par rapport à la même période de 2021. La Compagnie nationale du Rhône (CNR), deuxième producteur national d’hydroélectricité, enregistre une baisse de 25 % de sa production par rapport à la moyenne historique.

Renouvelables : la France à la traîne

Annoncé pour cet été, le projet de loi visant à accélérer le déploiement des énergies renouvelables ne sera finalement présenté qu'à la rentrée par le gouvernement. Le texte vise à simplifier les procédures et réduire les délais pour des projets solaires ou éoliens, terrestres ou en mer. Il faut dire que le pays est le seul au sein de l’Union européenne à ne pas avoir atteint ses objectifs à 2020. Les énergies renouvelables ont représenté 19,1 % de la consommation finale brute énergétique cette année-là, contre 23 % prévus. Et la première éolienne offshore n’a commencé à produire ses premiers électrons qu’en juin…

Charbon : c’est reparti pour un tour

Dans ce contexte de crise, la centrale à charbon de Saint-Avold (Moselle), officiellement fermée le 31 mars dernier, devrait bien redémarrer l'hiver prochain "à titre conservatoire, compte tenu de la situation ukrainienne" et des tensions sur le marché de l'énergie, a confirmé le ministère de la Transition énergétique. "Nous resterions, dans tous les cas, en dessous d'1 % d'électricité produite par le charbon", assure le ministère, "et aucun charbon russe ne serait utilisé".

Un article du projet de loi sur le pouvoir d’achat, adopté en première lecture la semaine dernière, permet ainsi de relever les plafonds d’émissions de gaz à effet de serre, en cas de "menace sur la sécurité d’approvisionnement en électricité" et à la condition de compenser les émissions. La France n'en a donc pas encore tout à fait fini avec le charbon, énergie la plus polluante, malgré la promesse d'Emmanuel Macron de fermer toutes les centrales au cours de son premier quinquennat.

Concepcion Alvarez @conce1

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