Sept éoliennes démolies dans l’Hérault pour atteinte à la biodiversité, une première en France

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Publié le 13 décembre 2023

Biodiversité 1 – éoliennes 0. La Cour d’appel de Nîmes a ordonné le démontage de sept éoliennes dans le parc Bernagues, dans la commune de Lunas (Hérault), le tout dans un délai de 15 mois. Les juges ont estimé que les atteintes à l’environnement étaient avérées. Cette victoire a été qualifiée d’"historique" par les défenseurs de l’environnement, bien que la société Énergie Renouvelable du Languedoc (ERL) a d’ores et déjà annoncé se pourvoir en cassation.

Les sept éoliennes de Lunas doivent être démontées et le site remis en état. C'est en résumé ce qu'a ordonné le 7 décembre dernier la Cour d’appel de Nîmes à la société Énergie Renouvelable du Languedoc (ERL). Et le tout doit être fait dans un délai de 15 mois, sous peine d’une astreinte de 3 000 euros par jour pendant 180 jours en cas de non-exécution de la décision dans ce laps de temps. Contactée par Novethic, l’entreprise a annoncé "se pourvoir en cassation".

Dans ce feuilleton long de 20 ans, c’est la deuxième fois que la justice condamne la société Énergie Renouvelable du Languedoc (ERL), filiale du groupe Valeco, et lui-même filiale de l’allemand EnBW, au démantèlement de ce site. En 2021, la Cour de cassation avait en effet déjà ordonné la "déconstruction du site" construit illégalement et avait renvoyé le dossier vers la cour d'appel de Nîmes.

Le permis de construire avait été annulé à deux reprises par le Conseil d'État en 2011 et 2012. Les juges avaient souligné que l’étude d’impact n’avait pas été assez poussée, notamment en ce qui concernait l’aigle royal, une espèce protégée et emblématique de la région Occitanie. L’entreprise avait malgré tout pris le risque de monter ses éoliennes pour une mise en service en 2017.

1 000 oiseaux tués en 2020 et un aigle royal en 2023

Le combat a donc repris pour les associations environnementales contre ces mâts de 93 mètres de haut, responsables selon elles de "graves dommages". Elles dénombrent 1 000 oiseaux tués rien qu’en 2020, ainsi qu’un aigle royal le 16 janvier 2023. Depuis, ces éoliennes sont à l’arrêt sur décision du préfet. Et ce sont ces points qui ont été relevés par les juges d'appel nîmois. Ces derniers ont noté que "la réalité des atteintes environnementales sérieuses est avérée" et qu’aucune solution technique proposée par l’exploitant n’a permis d’éviter la mort d’oiseaux.

Pour Marjolaine Villey-Migraine, porte-parole du collectif pour la protection des paysages et de la biodiversité 34-12, interviewée par nos confrères de France 3, "c’est une victoire […] mais le délai de démolition est vraiment indulgent". "Ils ont monté les éoliennes en 6 mois, alors pourquoi leur faudrait-il 15 mois pour démonter et remettre en état", a-t-elle ajouté. En attendant de les voir disparaître un jour du paysage, "avec cette décision, c’est un signal fort qui est envoyé", a confié au Parisien Me Nicolas Gallon, avocat du collectif.

Une décision qui pourrait faire jurisprudence

La décision de la Cour d’appel de Nîmes pourrait en effet être un "signal fort" et servir de jurisprudence alors que les procédures à l’encontre de ce secteur se multiplient en France et dans le monde ces dernières années. En novembre 2022, la Cour de cassation a condamné EDF à 3 000 euros d’amende pour la responsabilité de ses éoliennes dans la destruction illégale d'espèces protégées, sans néanmoins appeler à la démolition des 31 éoliennes de la Causse d’Aumelas (Hérault), mises en cause.

Et l’éolien ne fait pas l’unanimité non plus au nord de l’Europe. En Norvège, des militants écologistes et des Samis mènent un bras de fer avec le groupe énergétique public Statkraft. Le 11 octobre 2021, la Cour suprême norvégienne avait conclu que les deux parcs d’éoliennes installées sur la péninsule de Fosen, dans l’ouest du pays, sur des terres utilisées pour l’élevage de rennes, violaient les droits de ce dernier peuple autochtone d’Europe, droits pourtant garantis par l’ONU. Or "le démantèlement de toutes les éoliennes de Fosen n'est pas envisageable" ni "probable", a tenu à répondre le ministre du Pétrole et de l'Energie, Terje Aasland.

Blandine Garot

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